jeudi 30 juillet 2009

Champions League

J’ai déjà eu l’occasion de signaler que Moïse et Samuel font sans doute partie des champions d’intercession. Ce constat se dessine déjà au Psaume 99 :

Moïse et Aaron parmi ses prêtres,
et Samuel parmi ceux qui invoquent son nom,
invoquèrent YHWH, et il leur répondit. (Ps 99.6)

On notera le parallélisme « prêtres » – « ceux qui invoquent son nom » qui a pour effet de mettre Samuel sur un pied d’égalité avec les deux conducteurs du peuple pendant l’Exode.

Mais notre constat s’impose surtout en raison d’une parole de Dieu, adressée à Jérémie :

YHWH me dit : Quand Moïse et Samuel se tiendraient devant moi, je resterai insensible à l’égard de ce peuple. Chasse-le de ma vue, qu’il s’en aille ! (Jr 15.1)

Ce qui m’a frappé, en contemplant ce texte, c’est que les deux champions ont des points communs dans leur rapports avec la prêtrise d’Israël.

Il est vrai que Moïse officie comme un prêtre, notamment lorsqu’il s’agit d’instituer le souverain sacrificateur Aaron et ses fils (Lv 8.28). Mais sauf erreur de notre part, en dehors du Psaume 99 cité ci-dessus, il n’est jamais appelé « prêtre » dans les textes. Quand il traite avec Aaron (Nb 26.1,64) ou ses fils (Lv 21.1 ; Eléazar : Nb 26.3,63 ; 27.2,22 ; 31.6,12s,21,31,41,51,54 ; 32.2,28), ce sont ces derniers seuls qui sont désignés par ce titre. Comme nous sommes au début d’un nouveau régime, les frontières sont encore floues, mais il me semble difficile de considérer Moïse comme un prêtre au sens étroit.

En ce qui concerne Samuel, la situation est similaire. Bien qu’habitant la montagne d’Ephraïm (1 S 1.1) qui se trouve dans le territoire de Benjamin, Samuel n’appartient à aucune de ces tribus. Une lecture comparative de Ex 6.1-24 et de 1 Ch 6.1-13,18-23 permet de voir qu’il est Lévite. Le texte de 1 Samuel ne le dit pas, mais il y a quelques indices : le nom de son village, Ramataïm-Tsophim, signifie « les deux hauteurs des Tsophites », ces derniers étant les descendants du Lévite Tsouph (1 Sa 1.1 ; 1 Ch 6.19) ; le père de Samuel porte le nom Elqana (« acquis par Dieu ») – or tous les porteurs de ce nom dans l’AT, à une exception près (2 Ch 28.7) sont des Lévites. Sauf erreur de notre part, Samuel était donc Lévite. Mais tous les Lévites ne pouvaient pas prétendre à la prêtrise, réservée à Aaron et sa descendance. Or il faut remonter jusqu’au grand-père d’Aaron, Qehath (1 Ch 5.28s ; 6.20-23) pour trouver un ancêtre commun avec la famille de Samuel. En toute rigueur, Samuel n’a donc pas le droit d’officier en tant que prêtre. Et pourtant, nous le voyons officier au Temple de Silo (1 S 3.1) dormir près du coffre (1 S 3.3) et faire des sacrifices (1 S 16.2) ou du moins les bénir (1 S 9.13). Il reprochera vivement à Saül d’avoir offert un sacrifice à sa place (1 S 13.11). Bref, Samuel se comporte comme un (souverain) sacrificateur, sans l’être selon la lettre de la loi.

C’est amusant de voir que nos deux intercesseurs par excellence ne sont pas des prêtres ‘professionnels’. Quand Dieu suscite des poids lourds de l’intercession, ce sont des hommes en marge de l’institution sacerdotale, pourtant instituée comme intermédiaire entre Dieu et les hommes. On peut parfois observer la même chose dans nos Eglises où ce ne sont pas toujours les institutionnels qui ont la vie de prière la plus développée.

Ceci étant dit, on peu noter que Moïse et Samuel sont tous les deux très proches des sacrificateurs. Moïse est le frère d’Aaron et Samuel est comme un fils adoptif d’Eli. En faisant de ces hommes les intercesseurs les plus puissants, Dieu envoie aussi un message aux prêtres établis. Comme si le ministère institutionnel avait de temps en temps besoin de se frotter au charisme pur.

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